Conseils pour incarner un compagnon

La classe de compagnon est la classe polyvalente par excellence; elle permet de créer virtuellement n’importe quel personnage qui vous passe par la tête, hors des sentiers battus de D&D. Elle est idéale pour incarner (par exemple) : un espion, un héraut d’armes ou un diplomate, un forgeron un peu rebouteux, un colporteur à moitié honnête, un bourgeois en révolte contre son duc, un marchand audacieux, un universitaire qui voyage en quête de savoir, un cartographe, un marin, un batelier ou un pirate, ou toute autre idée de profil original. Il s’agira souvent de personnages qui exerçaient (ou du moins, ont appris, ou tenté d'apprendre) un autre métier avant de rencontrer vraiment l’aventure, par opposition à ces classes de PJ qui se dévouent entièrement à leur art depuis leur adolescence (prêtres, mages, guerriers…).  

 

Pour vous inspirer un personnage de compagnon, le mieux est sans doute de lire et de vous documenter, histoire de mieux appréhender les sociétés médiévales. Vous rencontrerez ainsi une foule de personnages qui s’éloignent des archétypes d’un « bon vieux D&D » mais peuvent être tentés par la voie de l’aventure. Certains d’entre eux peuvent être tout à fait fascinants à incarner. Il suffit de se rappeler qu’un monde médiéval fantastique n’est pas habité que par des guerriers, des magiciens, des prêtres et des voleurs; la majorité des citoyens sont des hommes du peuple, des hommes de métier; il n’y a pas de raison pour qu’ils ne puissent pas, eux aussi, peser sur le cours des évènements et infléchir le destin de leur région, de leur pays, ou même du monde dans lequel ils habitent… considérez cette question, et beaucoup de nouvelles portes s’ouvrent à vous!

 

Atouts :  Les compagnons peuvent devenir plutôt bons dans les arts du combat (même s’ils ne sont jamais aussi forts que les combattants purs), et peuvent même se spécialiser dans n’importe quelle arme s’ils le souhaitent, ce qui constitue un atout certain par rapport aux prêtres et autres voleurs. D’un autre côté, ils disposent d’un large éventail de compétences pour refléter leur parcours de vie et leurs savoirs - faire, souvent variés… si vous êtes tentés par un (assez) bon combattant, mais que vous souhaitez des talents plus diversifiés que n’en offre la classe de guerrier, alors compagnon  représente un choix pertinent…

 

Une possibilité parmi d’autres : démarrer comme compagnon afin de créer un personnage correspondant pleinement au profil que vous avez en tête; progresser comme tel pendant deux ou trois niveaux pour affiner vos principaux talents; puis commencer une carrière de guerrier  pur pour progresser davantage dans la puissance martiale… vous obtiendrez ainsi, à terme, un guerrier légèrement moins fort que d’autres du même niveau total,  mais aux talents plus variés, et surtout cohérent (sur le papier) avec son background.

 

A haut niveau, les personnages qui ne sont ni de purs combattants ni des utilisateurs de magie tendent à se sentir plus « faibles » que les autres … l’ouverture d’une seconde classe, ou plus simplement d’une voie, peut s’avérer utile pour renouveler le potentiel du personnage. Ceci ne s’adresse bien entendu pas au compagnons - mages, qui ont dès le départ un potentiel magique tout à fait intéressant … les compagnons mages sont probablement plus rares, parce qu’une telle classe ne peut se justifier que par des « études » de magie interrompues… le MD et le joueur devront être attentifs à construire ensemble un background cohérent, mais au final, ce personnage est extrêmement polyvalent et gratifiant à incarner.

 

Si vous n’avez pas opté pour le compagnon- mage, songez que votre classe dispose tout de même de facilités pour démarrer très rapidement une voie (y compris au premier niveau); celle du rebouteux, du dévôt  ou de l’initié  peuvent vous apporter d’emblée ce « petit plus » qui fait de votre PJ, dès le départ, un personnage complet, polyvalent, n’ayant rien envier aux autres membres du groupe. N’hésitez donc pas à utiliser cette option ! …

 

Le mot pour le MD :  pour donner sa pleine mesure, un personnage de compagnon aura aussi besoin de phases de jeu sans action, histoire de pouvoir exercer ses diverses compétences pour (par exemple) :  mener une enquête ou des négociations, poursuivre des recherches en bibliothèque, se renseigner sur un sujet donné, trouver un navire pour franchir le détroit, etc., etc. (en fonction du profil et des capacités du personnage). Si votre campagne se résume à des échanges de sorts et des combats, un compagnon pur   risque de se sentir parfois un ton en - dessous des autres PJ.

 

En préparant vos parties, gardez toujours dans un coin de votre tête le profil et les capacités de vos PJ : il est toujours bons de prévoir des moments où l’un d’entre eux (à tour de rôle) peut occuper l’avant-plan en utilisant ses talents spécifiques. Par exemple, s’il y a parmi eux un compagnon marin, pensez à prévoir des scènes en mer, au cours desquelles il pourra se montrer héroïque en se hissant dans la mature par grand vent et en pilotant le navire entre des récifs. Pour les personnages issus du commun peuple, le MD se souviendra aussi que cela peut être un avantage dans certaines circonstances : par exemple, dans les enquêtes, les gens d’humble origine se livreront plus facilement à quelqu’un qui est leur égal qu’à un noble chevalier ou un puissant mage…

 

Profil : Vous trouverez ci-dessous quelques profils de compagnon, juste pour vous donner une idée du potentiel de la classe – inutile de dire qu’il y a bien d’autres possibilités !

 

Ø       L’archer :  dans la société médiévale européenne, les archers professionnels appartenaient à des corps francs financés par des princes ou par les bourgeois des cités. Ils étaient d’origine roturière. En Angleterre, les hommes du peuple s’entraînaient régulièrement à l’arc, si bien que beaucoup d’entre eux étaient devenus des tireurs d’élite. Bien qu’ils ne fassent pas partie des soldats de métier, ces paysans et ces artisans faisaient la puissance de l’armée anglaise, dès lors que le roi les appelait aux armes.

 

La classe de compagnon est une bonne option pour incarner de tels personnages. Issu du peuple et exerçant un autre métier, votre PJ est moins fort qu’un véritable guerrier (dés de vie à 6 faces) et moins polyvalent dans sa maîtrise des armes; mais il dispose néanmoins d’une spécialisation à l’arc qui le rendra précieux pour son groupe de PJ. S’il est un archer professionnel membre d’un corps franc, il optera plutôt pour la variante d8,  pour refléter un entraînement militaire plus complet (un tuyau, pensez à équitation, les archers à cheval étaient des archers très bien soldés à la fin du MA !). Dites-vous aussi que, si vous souhaitez miser sur le combat à distance, vous n’avez pas besoin d’autant de points de vie qu’un combattant au corps à corps, donc si l’archer spécialisé vous tente, mieux vaut le compagnon que le guerrier… vous progresserez plus rapidement et vous aurez davantage de compétences : ces dernières dépendront de votre background (métiers exercés auparavant, etc.) ou viendront renforcer votre carrière de tireur d’élite (par. ex. la compétence observer !)

 

Ø       Le marin ou le batelier : Ces personnages sont par nature amenés à voyager et à braver des dangers. Il n’est pas étonnant qu’on en fasse aisément des aventuriers…  le marin de mer affronte tempête, récifs, monstres marins et pirates ; le batelier d’eau douce mène une vie moins tumultueuse mais doit tout de même faire face aux dangereux remous du fleuve, aux mascarets, à la traversée de régions en guerre…

 

Votre personnage de marinier développera en priorité des compétences liées à son métier : par exemple navigation, nager, utilisation de corde, équilibre et grimper  (pour faire le guignol sur les mats), cartographie, connaissance des créatures ou des éléments, observer, artisanat  (bois), etc. Mais il a aussi beaucoup voyagé, si bien qu’il a eu l’occasion d’apprendre (vaille que vaille) plusieurs langues, et de développer sa connaissance des cultures étrangères (littérature et traditions, connaissance des religions, droits et coutumes,  etc.). Si l’on y ajoute des compétences liées à la négociation avec les peuples étrangers (empathie, baratin…), on comprend que votre PJ fera un guide précieux pour les autres membres de son groupe, en voyage dans des pays lointains…

 

Enfin, sur le plan martial, votre PJ sera probablement du genre polyvalent, et il utilisera de préférence des armes légères, du type que l’on emporte sur un bateau. Habitué des tavernes tumultueuses du port, il est probable que la lutte et la dague fassent partie de ses attributions…

 

Ø       Le compagnon- artisan :   Il n’y a pas si longtemps, les jeunes gens qui souhaitaient exceller dans un métier artisanal faisaient leur tour de France  pour rencontrer divers maîtres artisans experts et travailler un temps pour eux. Inutile de dire que, dans un monde médiéval (et en particulier fantastique), un tel parcours peut être source de multiples aventures…  pourquoi pas incarner l’un de ces jeunes artisans errants !

 

Un compagnon artisan excellera probablement dans une ou plusieurs artisanat(s) (ce qui n’est pas négligeable dans les expéditions à long terme, pour entretenir vos bottes trouées ou ré- emmancher votre arme d’hast brisée ! Ne riez pas ! Certains MD feront payer cher à vos pieds l’état de vos bottes !). Comme le marin, il aura déjà voyagé et donc développé des compétences en langues, droits et coutumes, empathie, baratin, etc. Il aura appris à se faire discret sur les routes pour éviter les mauvaises rencontres (se cacher, déplacement silencieux, écouter…) et à se servir d’une arme (ne serait-ce que du bâton, pourquoi pas d’une fronde, d’une épée ou d’un arc). Il est possible aussi qu’il ait un peu mal tourné par moment, ne serait-ce que parce qu’il a manqué d’emploi et connu la faim; dans ce cas, les talents « de voleur » (pick pocket, crochetage, jeu…) seront au rendez-vous.

 

Incarner ce type de profil est probablement un défi, parce qu’il s’agit d’un personnage particulièrement sobre, issu du commun peuple; mais il est intéressant pour démarrer humblement. L’ouverture d’une voie du rebouteux  (ou de l’initié, ou du dévôt) est à prendre en considération pour compléter le profil du personnage. Un MD imaginatif pourrait même créer des entités surnaturelles liées pour une raison ou une autre à l’exercice d’un métier donné (voie de l’initié ), sorte de saints patrons susceptible de rechercher des serviteurs artisans et de leur accorder quelques capacités surnaturelles.

 

Il est possible également de faire évoluer votre personnage de façon cohérente avec une seconde classe, selon un plan défini dès le départ. Imaginez par exemple : votre artisan luthier rêve de devenir barde – votre forgeron hérite des secrets d’un vieux sorcier – ou encore, à force de copier de vieux grimoires, votre parcheminier ou copiste apprend la magie sur le tas (compagnon-mage)…

 

Ø       Le bourgeois : le terme bourgeois désigne un habitant d’une cité, disposant de la pleine citoyenneté. Il n’est pas forcément très riche, mais exerce un métier honnête au sein d’une corporation.

 

Ø       Le compagnon bachelier : le Moyen Age européen connaissait déjà les universités; on peut même dire que celles-ci ont assez peu évolué depuis lors dans leur manière de fonctionner. Des maîtres y enseignaient le droit, la médecine ou la théologie à des étudiants venus parfois de très loin, qui logeaient dans des chambres aux loyers abordables fournies par l’université, et se réunissaient en régionales promptes à s’affronter les unes les autres dans des joutes parfois bon enfant, parfois sanglantes. Les béjaunes  (nouveaux venus) étaient moqués jusqu’à leur baptême… les étudiants faisaient la fête, couraient la gueuse (et la femme mariée), et tournaient parfois très mal…  ceux qui se montraient sérieux (ou payaient les professeurs) obtenaient leur licence  (droit d’enseigner) et finissaient bachelier puis docteur, sous la protection du clergé qui souhaitait favoriser le développement des connaissances. Il est facile de se documenter sur ces universités historiques (Paris, Bologne, etc…), puis de les transposer dans un monde fantastique, en ajoutant par exemple quelques matières enseignées (les lettres elfiques, la science des créatures inhumaines, etc.) : de bons scénarios en perspective…

 

Si votre compagnon bachelier  est du genre mauvais garçon, comme Villon, il est probable que ses compétences soient un mix entre des talents dits « de voleur » (du baratin au crochetage en passant par le jeu et la contrefaçon, très judicieuse dans le cas d’un personnage aussi lettré) et de connaissances acquises sur les bancs de l’université.

 

On peut aussi imaginer d’incarner un élève plus sérieux,  un docteur  que le besoin d’accumuler du savoir aurait poussé sur les routes. Dans ce cas, compagnon-mage serait une excellente option. Pensez par exemple à la vie d’Abélard, le philosophe, qui enseignait à l’université, mais dont l’amour avec Eloïse est devenu légendaire … en s’inspirant de ce sacré bonhomme, on pourrait créer un PNJ mémorable, voir un PJ !

 

Enfin, si de nos jours les professeurs d’université ont un peu tendance à délaisser l’activité physique (encore que…), ce ne sera pas forcément le cas dans un monde médiéval fantastique. La plupart des gens apprennent à se défendre; dans les villes du Moyen Age européen, épées et dagues sont des objets courants. Villon, lui, était probablement spécialisé à la dague … de plus, nous savons tous que les PJ sont par nature un peu plus doués, un peu plus héroïques que le commun des mortels : il n’y a donc pas de gêne à créer un compagnon bachelier  habile à l’épée…